Histoire
Lévolution de ce bâtiment a
été révélée par différentes
opérations de fouilles (menées par l'AFAN) au cours
de ces vingt dernières années.
Deux campagnes de sondages menées en 1986 et 1990, puis
une étude du bâti en 2000 (avant la restauration
de cet édifice), ont permis de mettre au jour des niveaux
antiques et médiévaux.
La maison se situe à lintérieur
du cloître de Saint-Jean, au niveau de la porte nord et
vient sappuyer contre la muraille : le mur nord de lîlot
est constitué par le mur de lenceinte canoniale.
Les textes rapportent que cette enceinte fut construite sous lépiscopat
de Guichard de Pontigny entre 1165 et 1180.
Les vestiges les plus anciens de la maison remontent
au XIIIe siècle. A cette époque elle semble déjà
constituée dau moins deux corps de logis perpendiculaires
: lun sur la rue Saint-Jean, dans langle sud-ouest
de lîlot et lautre sur la cour dans langle
nord-est.
Au cours des XIVe et XVe siècles, le bâti
connaît quelques modifications, largement effacées
par les restructurations de la période suivante. Il n'en
reste que laménagement de laccès de
la rue Saint-Jean à la cour intérieure.
La maison actuelle est l'un des rares bâtiments
du XVe siècle conservé dans le Vieux Lyon, elle
témoigne de la transition entre le style gothique flamboyant
et la Renaissance.
Dès 1496 (et jusqu'en 1516), de grands travaux de réorganisation
de la parcelle sont lancés. Sur la base des maisons médiévales
des XIIe et XIIIe siècles, à lintérieur
du cadre rigide fixé par le cloître, la demeure du
chanoine-comte François dEstaing est construite.
Ce grand dignitaire du chapitre de Saint-Jean (évêque
de Rodez en 1529), détenant le titre de Chamarier, était
en charge de la sécurité, de la justice, de la voirie
et avait sous ses ordres douze agents de surveillance.
Responsable du cloître, il détenait les clefs des
six portes des fortifications de la ville et percevait également
les taxes pendant les foires.
La magnificence de la maison, façade et intérieurs,
trahit l'importante position sociale du propriétaire.
L'habitat médiéval morcelé
est transformé en une vaste demeure qui adopte le schéma
classique de la maison urbaine de la Renaissance : plusieurs corps
de logis reliés par des galeries extérieures desservies
par un escalier en vis.
Cette nouvelle architecture est complétée
par un programme décoratif denduit peint dont de
nombreux fragments ont été mis au jour.
Ce sont principalement les décors qui vont
être modifiés au cours des siècles suivants.
Ainsi peut-on suivre la succession des différents chamariers
du XVIIe siècle à travers les décors peints
et les blasons.
En 1672 et 1673, la marquise de Sévigné
séjourne chez le Chamarier de lépoque, beau-frère
de son gendre le Comte de Grignan. Lyon lui sert de halte lorsqu'elle
se rend au château de Grignan pour voir sa fille.
A la Révolution française, le quartier
canonial est démantelé ; au cours du XIXe siècle,
avec sa transformation en logements populaires, la maison se paupérise
à limage de lensemble du quartier Saint-Jean.
Classée Monument Historique le 15 septembre
1943, elle est inoccupée depuis 1987. Seule la pâtisserie
"La Marquise" occupe les lieux au rez-de-chaussée.
Un vaste projet de restauration est lancé en 2004 afin
den restituer létat initial. Cofinancés
par la Ville de Lyon et lÉtat, les travaux ont permis
la réouverture de galeries, la restauration des décors
peints, des vitraux et des menuiseries ainsi que la réfection
des fenêtres à meneaux.
Architecture
Transition entre la période Gothique et
la période Renaissance, les années 1500 voient se
développer les échanges entre la France et lItalie,
pays initiateur de la Renaissance dès 1400. Les influences
italianisantes pénètrent petit à petit en
France et à Lyon.
La Maison du Chamarier, construite à cette
époque, allie ces influences nouvelles au gothique flamboyant
: c'est la première maison Renaissance du quartier. |
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La structure interne de la demeure, composée de trois corps
de bâtiment, répond au schéma traditionnel
des maisons de ville de la Renaissance : une cour intérieure
dans laquelle prend place un escalier en vis (inscrit dans une
tour) et des galeries ouvertes reliant les corps de bâtiment
entre eux.
Façade
La façade principale de la maison, quant à elle,
est encore un authentique témoignage du gothique flamboyant,
tout particulièrement en matière de décoration.
Composée dun rez-de-chaussée
destiné aux magasins, de deux étages (organisés
de manière identique, avec respectivement cinq et six fenêtres)
et dun étage d'attique surmonté de six larmiers
en corniche répartis de manière irrégulière,
la façade est structurée et homogène.
Le toit à double pente réalisé
en tuiles, est hérissé de quatre cheminées.
L'important programme décoratif de cette
façade traduit la position sociale de celui qui occupait
les lieux. Des blasons sculptés présentent les armes
de la famille.
Les fenêtres, dont les meneaux sont manquants, sont accolées
et séparées par des pinacles ornés de fleurons
et crochets.
Des corniches de pierre courent le long de la façade et
soulignent l'horizontalité.
Décor
Les différents chamariers accordèrent beaucoup dimportance
au décor intérieur de la demeure, chacun y fit apposer
les armes de sa famille.
On retrouve ainsi les armes de la famille dEstaing (composées
dun lys) dans les décors de la galerie du premier
niveau, la couronne de laurier de Charles dEstaing sur la
rampe dappui du premier niveau de laile centrale,
tout comme les armes du Chapitre de la cathédrale.
Le décor probablement le plus remarquable
est la fresque peinte du cabinet dhumaniste italianisant
de la galerie ouest.
Puits et fontaine
Un puits et une fontaine, attribués à larchitecte
Philibert Delorme, ornent la cour intérieure de cet hôtel
devenu une des plus belles demeures du quartier.
Le puits daté de la fin du XVIe siècle
est remarquable par ses proportions et la richesse de ses décorations.
La construction sélève légèrement
au-dessus du sol et se compose de trois parties :
- le soubassement avec une double rangée de caissons décorés
de rosaces
- le puits lui-même couvert par une trompe décorée
d'une coquille
- la couverture, composée dune coupole surmontée
dun lion sculpté.
Plusieurs fois transporté, il a finalement repris sa place
originelle dans la cour de la maison du Chamarier.
La fontaine située juste à côté
est un édicule qui venait en complément du puits. Construites en forme de niche, ses décorations sont similaires
à celles du puits.
Lescalier
Lescalier en vis torsadée de style ogival est lautre
élément remarquable de la maison du Chamarier. Il
se distingue par sa taille imposante et ses ornementations. Là
encore, les styles gothique flamboyant et Renaissance se mélangent.
L'entrée de la tour dans laquelle s'inscrit
l'escalier, est surmontée d'un dais orné d'un pinacle
à clochetons semblable à ceux des entrées
des églises gothiques.
A l'intérieur de la tour, les angles de
l'escalier sont ornés, du rez-de-chaussée au premier
étage, de trompes décorées avec la coquille
renaissance.
Entre le premier et le deuxième étage la décoration
se fait plus discrète : les coquilles dangle ont
disparu au profit de têtes dangelots.
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